Souhaité par les uns –
parfois frénétiquement – et redouté par les autres, le changement paraît
inévitable dans nos existences. En psychothérapie et en intervention sociale,
il est même recherché voire suscité par les professionnels. Il constitue même
parfois la solution pour résoudre les problèmes liés à un
changement intervenu dans la vie d’un patient !
Face au changement,
nous ne sommes pas égaux. Selon notre tempérament ou nos conditions de vie,
nous pouvons le vivre comme une aubaine (l’opportunité de changer de travail
quand celui qu’on exerce ne nous plaît plus), comme une source de contrariété
et de fatigue (en période de stress) ou comme une malédiction (dans une phase
dépressive où toute stimulation est vécue avec pénibilité). Certaines
personnalités, par ailleurs, aiment le changement et s’étiolent dans la
routine, d’autres sont heureuses dans une vie bercée d’habitudes.
Quoi qu’il en soit, l’action sociale et la psychothérapie
sont, elles, génératrices de changements : changements des croyances, de
comportements, de modes de communication, de modes d’interactions, etc. Et la
difficulté consiste, d’une part, à activer des personnes dont le cycle de vie
s’est arrêté et qui se sont cristallisées sur un problème et, d’autre part, à
garder l’équilibre entre le besoin de
sécurité (et donc de non - changement) et la nécessité de changer pour aller
mieux, l’enjeu pouvant être le maintien de l’alliance thérapeutique, et donc
l’efficacité du travail.
Changements
intérieurs ou changements extérieurs ?
C’est peut-être la première question à se poser : que
veut-on changer, soi ou notre contexte de vie ? Cette question est
importante, elle renvoie à une série de considérations :
Changer son contexte de vie est possible : changer de
travail, déménager, divorcer, etc., mais évidemment ce changement s’inscrit
dans un contexte et il faut tenir compte des paramètres en jeu : famille,
finances, contraintes spatio-temporelles… Dans ce cas, un changement en
entraîne souvent d’autres – et parfois imprévus. Changer se planifie donc.
Changer son contexte de vie peut être très difficile :
changer le comportement de ses enfants, de son conjoint, de son patron, de ses
collègues de travail, de sa famille… n’est jamais gagné. Changer l’autre est
souvent un leurre (et a-t-on raison de le faire d’ailleurs, est-ce pour notre
bien ou pour le bien de l’autre ?) Il serait préférable de changer sa
façon de penser, d’agir, de parler en espérant que cela ait une influence sur
l’autre. Mais là aussi, si influence il y a, la teneur de cette influence est
souvent imprévisible…
Changer soi semble le plus concret – sans pour autant être
le plus facile. Examinons cette idée dans la suite de cet article.
Les questions à se
poser
Dans leur livre Le
courage de changer (Odile Jacob, 2001), Willy Pasini et Donata Francescato
recensent huit questions à se poser en priorité si on veut changer :
- Le changement est-il pour nous un risque ou un atout ?
- Sommes-nous plutôt nomades ou sédentaires, les nomades étant plus disposés au changement ?
- Désirons-nous changer lentement ou vite ?
- Changer nous fait-il peur ou éveille-t-il notre courage ?
- Changer pour quoi, pour aller vers quoi exactement (sans répéter les erreurs ou les scénarios emprisonnants du passé) ?
- Changer pour qui, pour soi, pour l’autre aimé, pour se conformer ?
- Quelles stratégies de changement allons-nous mettre en place ?
- Concevons-nous le changement comme un besoin (temporaire) d’évasion ou comme une quête de soi authentique ?
Les réponses à ces huit questions orientent notre désir (ou
besoin) de changement. Elles constituent la part rationnelle de notre
impulsion. Souvent, la décision de changer est émotionnelle, réactive. Le
changement lui-même est un processus plus réflexif. Ce qui ne signifie pas que
les émotions soient absentes lors de cette phase plus rationnelle. Au
contraire, raison et émotions communiquent pour nous aider à prendre les
meilleures décisions…
Benoît Demonty